Imagerie de l’épilepsie : recommandations européennes pour une prise en charge optimale

Rédigé le 01/10/2025
Augustin Lecler | RadioFocus

La Société Européenne de Neuroradiologie publie de nouvelles recommandations pour l’évaluation en imagerie des patients souffrant de crises épileptiques et d’épilepsie, mettant l’accent sur la nécessité d’une prise en charge individualisée fondée sur des protocoles d’imagerie adaptés. Ces recommandations, rédigées par un collectif d’experts, détaillent les indications de l’imagerie selon différents contextes cliniques, les protocoles à privilégier, ainsi que les principaux signes radiologiques à rechercher dans les épilepsies focales et généralisées.

 


 


Imagerie et situations cliniques

 

Le recours à l’imagerie cérébrale est justifié dans quatre situations principales : première crise non provoquée, état de mal épileptique, diagnostic récent d’épilepsie et épilepsie pharmacorésistante.

En cas de première crise, le scanner est souvent utilisé en urgence pour exclure une hémorragie, un accident vasculaire ou une tumeur. En l’absence d’anomalie détectée par tomodensitométrie, une imagerie par résonance magnétique s’impose, cette dernière offrant une meilleure sensibilité pour la recherche de lésions épileptogènes.

Lors d’un état de mal épileptique, la tomodensitométrie permet d’écarter rapidement une cause aiguë. Lorsque l’étiologie demeure incertaine, l’imagerie par résonance magnétique et certaines séquences de perfusion peuvent préciser l’origine du trouble, en mettant en évidence des modifications de signal liées à l’activité épileptique.

Chez les patients ayant reçu un diagnostic récent d’épilepsie, la réalisation d’une imagerie par résonance magnétique est recommandée, sauf pour les formes typiques d’épilepsie généralisée primaire ou les épilepsies bénignes de l’enfant à profil clinique et électroencéphalographique caractéristique. L’identification d’une anomalie structurelle influence directement le pronostic et la stratégie thérapeutique.

Pour les personnes souffrant d’épilepsie pharmacorésistante, l’imagerie intervient dans le cadre d’une évaluation multidisciplinaire visant à localiser précisément la zone épileptogène. Cette démarche repose sur la corrélation entre les anomalies détectées en imagerie et les données cliniques, électroencéphalographiques ou issues d’autres examens fonctionnels (tomographie par émission de positons, scintigraphie cérébrale). Dans cette situation de résistance au traitement médical, la mise en évidence de la zone épileptogène devient primordiale car une solution chirurgicale est envisagée. Cela nécessite donc une imagerie avec séquences optimisées, qui peut être réalisée par tout neuroradiologue, en vue d’une expertise en centre spécialisé.

 

Protocole d’imagerie dédié à l’épilepsie

 

Les recommandations européennes insistent sur l’importance d’un protocole d’imagerie adapté, notamment pour détecter les lésions subtiles telles que la sclérose hippocampique ou la dysplasie corticale focale, fréquentes dans les formes pharmacorésistantes. Le protocole HARNESS-MR (Harmonised Neuroimaging of Epilepsy Structural Sequence), recommandé au niveau international, prévoit des séquences tridimensionnelles à haute résolution et des coupes coronales fines perpendiculaires à l’hippocampe.
 

Protocole HARNESS :
 

  • 3D T1 IR type MPRAGE
     
  • 3D FLAIR isotropique (1 × 1 × 1 mm)
     
  • Coronal T2 haute résolution en 2 mm, perpendiculaires à l’axe de l’hippocampe
     
  • Séquences SWI ou T2*
     

Des séquences optionnelles comme 3D T2 TSE, DIR (double inversion recovery) ou 3DT1 après injection peuvent être réalisées.

En complément et dans les situations où la détection de la zone épileptogène devient essentielle (épilepsie pharmacorésistante) un protocole d’imagerie avancée, réalisé en complément de la première IRM négative, peut être réalisé en réalisant des séquence de type MP2RAGE, DIR, 3D-EDGE (Edge-enhancing Gradient Echo), FLAWS (Fluid and White Matter Suppression), ASL… Ce type de protocole, à mettre en place avec son ingénieur d’application avancé, peut-être réalisé en pratique quotidienne à 3T, avec un temps d’acquisition de l’ordre de 20-25 min.

 

Principales lésions épileptogènes et signes radiologiques

 

Les recommandations font le point sur 3 causes fréquentes d’épilepsie : la sclérose hippocampique, la dysplasie corticale focale et les tumeurs associées à l’épilepsie de longue durée.

La sclérose hippocampique se manifeste par une atrophie de l’hippocampe, un hypersignal en pondération T2 et FLAIR, ainsi qu’une perte de la différenciation des couches internes. Des anomalies secondaires peuvent accompagner ce tableau, comme une atrophie du lobe temporal ou du corps mamillaire.

La dysplasie corticale focale, cause fréquente d’épilepsie réfractaire de l’enfant et du jeune adulte, présente des signes très discrets : épaississement cortical, effacement de la limite substance grise/blanche, hypersignal sous-cortical ou encore aspect de “transmantle” signe en hypersignal T2.

Les tumeurs associées à l’épilepsie, en particulier les tumeurs neurogliales de bas grade (gangliogliome, tumeur neuroépithéliale dysembryoplastique), se localisent souvent dans le lobe temporal et sont caractérisées par un aspect mixte solide-kystique, des calcifications fréquentes et une faible prise de contraste.

 

En France

 

En complément de ces recommandations européennes, la société Française de Neuroradiologie a récemment proposé d'harmoniser la prise en charge des patients sous l'égide de Charles MELLERIO. Sur le site de la SFNR est disponible une demande standardisée d'IRM pour épilepsie à destination des neurologues (afin de les inciter à fournir les renseignements cliniques).

Sur cette page Internet, figure également les recommandations des paramètres IRM des constructeurs SIEMENS, GE et CANON à 1,5 et 3 T : 

Lien SFNR épilepsie

 

L'ESSENTIEL
 En cas de première crise à l’âge adulte sans cause évidente, il est recommandé de réaliser un scanner cérébral. Si aucune lésion expliquant la crise n’est détectée, il est conseillé de faire une IRM.

 L’intégration des examens d’imagerie (IRM avec protocole HARNESS) dans une discussion multidisciplinaire, associant neuroradiologues, neurologues, neurochirurgiens et neuropsychologues, améliore encore la pertinence diagnostique et la qualité de la prise en charge.

 Dans les situations d’épilepsie pharmaco-résistantes, la détection du foyer épileptogène est essentielle pour envisager un traitement chirurgical.

 

Bargalló N, Vitali P, et al. ESR Essentials: Image evaluation of patients with seizures and epilepsy—practice recommendations by the European Society of Neuroradiology. Eur Radiol 2025;35:3385-3395.

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